Une situation, deux analyses différentes du prix de vente d’un terrain
Pour aborder la problématique de la renégociation à la baisse d’un prix de vente de terrain à bâtir, le plus parlant reste l’exemple concret, tiré d’une situation réelle.
Exposé
Deux terrains mitoyens sont à vendre. Ils ont une superficie identique de 800 m². Tous deux sont classés en zone UD du PLU de la commune et viabilisés.
En raison de leur configuration et des règles de prospect figurant au règlement de la zone, les études de capacité confirment la possibilité de construire, sur deux niveaux, 180 m² de SDP sur le terrain A et 175 m² sur le terrain B.
Autre différence de taille entre les deux fonciers : le terrain B est parfaitement plat, le terrain A, lui, accuse une pente de plus de 5%.
Enfin, les deux terrains sont vendus à un prix au m² de SDP identique : 240€. En conséquence, le prix de vente affiché est de 43 200€ pour le terrain A et de 42 000€ pour le terrain B.
L’analyse côté vendeur
La différence de prix entre les deux biens est anecdotique. Le vendeur du terrain A est donc en droit de penser que pour l’acquéreur, cela ne fera pas grande différence. Par ailleurs, il se dit qu’en dernière extrémité il s’alignera sur le prix du terrain B, si la négociation l’exige.
Malheureusement, il omet de prendre en compte une chose : la déclivité de son terrain.
Car qui dit pente, dit coûts de terrassement et d’adaptation au sol de la construction plus importants.
L’analyse côté acquéreur
Concrètement, pour l’acquéreur, cela signifie tout simplement que pour construire une maison de 170 m², quand bien même les terrains seraient tous deux proposés à 42 000€, le coût de la construction est plus important sur la parcelle A que sur la B.
A moins d’un coup de cœur, toutes choses égales par ailleurs, l’acquéreur devrait logiquement se positionner pour l’acquisition du terrain B.
Vous voyez où nous voulons en venir ?
Dans la tête d’un acquéreur particulier
Le particulier qui recherche sérieusement un terrain pour y construire une habitation ou un local d’activité, par exemple, a logiquement établi un pré-projet, même sommaire.
Il a défini le nombre de mètres carrés qu’il souhaite bâtir, et a listé un certain nombre de caractéristiques de son projet : nombre de pièces, nombre de niveaux, taille du jardin, type de garage, etc.
En toute logique, il a aussi déterminé un budget global, idéalement décomposé en prix d’achat du terrain et coût de la construction.
S’il n’en est rien, c’est que vraisemblablement :
- soit son projet n’est pas abouti,
- soit qu’il manque de sérieux
- soit qu’il dispose d’un budget illimité… ce qui malheureusement est rare.
S’il s’agit d’un acquéreur sérieux, il va cibler les offres de terrains à vendre qui rentrent dans ses critères.
Comment procède t-il ?
Dans tous les cas de figure, pour se positionner comme candidat acquéreur sur un foncier, le particulier va d’abord s’assurer que le terrain répond à ses critères de surface, de caractéristiques (localisation, desserte, environnement) et de constructibilité.
En second lieu, il va vérifier que le prix de vente rentre dans son budget. Pour ce faire, il va faire un « calcul à l’envers », en prenant en considération les caractéristiques du foncier auquel il s’intéresse.
Exemple concret
Imaginons qu’un acquéreur ait un budget global de 280 000€ et que la construction de la maison de 100 m² qu’il la projette lui en coûte, à elle seule, 200 000€.
Son budget pour l’acquisition du terrain est donc par déduction de 80 000€.
Compte tenu de ses critères, du marché et du prix, 2 terrains de 800 m² rentrent dans son budget :
- Le premier est boisé et nécessiterait de gros travaux préparatoires de défrichage.
- Le second est tout en longueur et la limite de la parcelle sur le domaine public est très étroite. En conséquence, il lui faudrait implanter sa construction très en retrait de la voie.
Sauf coup de cœur irrationnel pour l’un des deux terrains, le candidat acquéreur va comparer les surcoûts induits par les caractéristiques de ces 2 terrains sur son budget pour faire son choix ou négocier une baisse de prix.
En revanche, s’il s’avère que ces surcoûts sont de nature à mettre en péril l’équilibre financier de son opération et qu’aucune négociation sur le prix de vente n’est envisageable, il ne va tout simplement pas se positionner. Il remettra tout simplement son projet à plus tard et attendra qu’un nouveau bien répondant à ses critères soit mis sur le marché.
Dans la tête d’un acquéreur professionnel
Si le principe demeure le même, l’appréciation d’un prix de vente de terrain à bâtir par un acquéreur professionnel, de type promoteur immobilier ou lotisseur, présente des spécificités.
En effet, l’enveloppe budgétaire d’un particulier qui souhaite acquérir un terrain pour y construire son habitation est fonction de ses revenus, de son épargne et du financement bancaire qu’il escompte.
Celle du professionnel, dont l’objectif est de commercialiser un produit issu du terrain qu’il achète (maison, appartement, lot de lotissement, etc.), est fonction du chiffre d’affaire qu’il espère réaliser et donc de la marge d’opération qu’il va en dégager.
jaiunterrain.fr vous propose de creuser le sujet.
Le terrain à bâtir : matière première de l’acquéreur professionnel
Qu’il soit lotisseur ou promoteur immobilier, pour l’acquéreur professionnel, le terrain s’assimile à une matière première. Cette matière première, il va la transformer par son action de sorte à en faire un nouveau produit, qu’il va commercialiser.
Le promoteur : un artisan presque comme un autre
Pour mieux comprendre, jaiunterrain.fr vous propose de faire un parallèle avec une profession artisanale : le menuisier.
Le menuisier acquiert du bois : c’est sa matière première. Il reçoit du bois brut, qu’il va raboter, couper, sculpter parfois, et l’assembler pour en faire un meuble.
Processus de mise en vente d’un nouveau produit
Bien avant d’être mis en vente, le nouveau meuble va d’abord être conçu par une équipe de designers. Puis il va subir des tests, de résistance par exemple, ou faire l’objet d’une certification, par des organismes indépendants, que le menuisier va rémunérer.
En fin de processus, le meuble fabriqué par le menuisier sera commercialisé dans son magasin d’usine, par des vendeurs salariés de son entreprise.
La fixation du prix de vente
Pour fixer le prix de vente de son meuble, le menuisier va prendre en compte :
- Le coût de la matière première : le bois
- Le montant de ses charges : le loyer de l’usine, l’électricité, le remboursement du prêt qu’il a souscrit pour l’acquisition de ses machines, le coût de leur entretien, son salaire ainsi que celui ses employés (vendeurs, comptable, secrétaire, menuisiers, agent d’entretien), etc.
- La rémunération des prestataires extérieurs auxquels il aura fait appel pour la fabrication du meuble (le designer, le bureau de certification) ou pour sa commercialisation (le graphiste qui a conçu son prospectus promotionnel, par exemple)
- La marge qu’il doit réaliser pour faire croître son entreprise et rémunérer ses associés éventuels.
Il va aussi réaliser une étude de marché, pour confirmer ou non son positionnement, et adapter son prix de vente ou son produit en fonction.
La recherche de l’équilibre budgétaire
S’il apparaît que son bilan prévisionnel est déficitaire, quels sont les leviers qu’il peut actionner pour y remédier ?
Il n’y en a malheureusement pas beaucoup :
- Augmenter le prix de vente, à condition de rester compétitif sur le marché,
- Réduire sa marge, en courant le risque de mettre son entreprise en difficulté,
- Renégocier avec son fournisseur le prix de sa matière première.
Si le parallèle prête à sourire, il n’est demeure pas moins que l’approche du menuisier est strictement identique à celle du promoteur immobilier.
Exemple : Les coachs de jaiunterrain.fr ont été contactés un jour par Monsieur D., propriétaire d’un terrain à bâtir dans une grande agglomération française. Au premier rendez-vous téléphonique, il leur est apparu totalement désemparé.
Pourquoi ? Monsieur D. avait posté une annonce sur un site bien connu 3 semaines auparavant et avait instamment besoin d’aide pour faire face aux sollicitations de promoteurs, plus ou moins sérieux, qui sonnaient à sa porte. Ils étaient 15, 15 acquéreurs professionnels intéressés par son bien.
Pas de quoi être désemparé selon vous ?
Et bien si, car aucun ne formulait son offre de façon à pouvoir être facilement comparée avec celle des autres au point que Monsieur D., fatigué, en venait à envisager de vendre son terrain au plus insistant… pour s’en débarasser.
Cet exemple illustre le fait qu’un acquéreur professionnel n’est pas, par essence, dans une logique de renégociation systématique du prix d’un foncier à la baisse. Au contraire, en situation de forte concurrence entre opérateurs, il va au contraire chercher à se démarquer en sur-enchérissant.
Les motifs les plus courants de renégociation à la baisse d’un prix de foncier
Sauf cas particulier de professionnels peu scrupuleux, un promoteur immobilier ou un lotisseur ne renégocie un prix d’acquisition qu’en cas de nécessité telle que :
- La découverte d’un surcoût technique, du fait de la nature du terrain.
Exemple : entre la signature du compromis et l’acquisition définitive, le promoteur a découvert que le sol n’avait pas la portance nécessaire pour supporter la construction envisagée. - Une constructibilité autorisée par la collectivité inférieure à celle de la capacité d’architecte.
Exemple : le PLU autorise la construction d’un immeuble de 4 étages mais la commune refuse de délivrer un permis de construire pour un projet de plus de 3 étages, au motif de la préservation du patrimoine. - Une obligation de réaliser un certain pourcentage de logements locatifs sociaux, supérieur à celui indiqué dans le règlement du document local d’urbanisme.
- Un effondrement du marché des logements neufs ou des terrains à bâtir, qui se traduit par une baisse des prix de vente de ces biens.
Contre exemple : la revalorisation du prix de vente
Et fort heureusement, dans d’autres cas, grâces aux économies d’échelle réalisées ou au succès commercial d’un produit, il va être en mesure de réévaluer à la hausse son prix d’acquisition définitif, dans une logique de «gagnant / gagnant». Comment ? En intégrant dans la promesse de vente qu’il aura signée avec le vendeur du foncier une clause de retour à meilleure fortune, par exemple, ou en indexant le prix de vente du terrain sur le nombre de mètres carrés autorisés par permis de construire.
Exemple : Un terrain à bâtir est proposé à la vente au prix de 150 000€. D’après l’étude de capacité d’architecte commandée par son propriétaire, il permet de construire environ 1000 m² de surface de plancher (SDP).
Un promoteur immobilier se déclare intéressé par son acquisition. Il propose au propriétaire du terrain d’indexer son prix de vente définitif sur le nombre de m² de SDP définitivement obtenus par permis de construire car il considère qu’au final, ce sont plus que 1 000 m² qu’il construira et commercialisera.
Le vendeur et le promoteur tombent d’accord sur une valorisation à 100 € des m² autorisés au delà 1 000. La promesse de vente est donc rédigée en conséquence.
Le promoteur dépose une demande de permis de construire pour 1 500 m² de SDP et l’obtient. Au jour de la vente définitive ce n’est donc pas 150 000€ qu’il paie au vendeur mais 150 000 + (500 m² x 100 €), soit 200 000 €.