Toute personne ayant quelque chose à vendre, qu’il s’agisse de ses aptitudes professionnelles en entretien d’embauche, de sa voiture d’occasion ou de l’appartement dans lequel elle a vécu tant de bons moments, peut être tentée (même inconsciemment) d’enjoliver les choses. C’est naturel.
Parfois, c’est totalement sans conséquences. En effet, nul ne viendra rechercher votre responsabilité si votre voisine du dessus marche chez elle, une semaine sur deux, en talon aiguilles à 2h du matin, ce que vous avez malencontreusement omis de préciser aux personnes intéressées par votre 3 pièces, lors des visites.
Si en revanche, vous avez volontairement passé sous silence la vétusté de votre installation électrique ou le vote par l’assemblée générale des copropriétaires d’un ravalement de façade, alors les conséquences de votre «oubli» peuvent être bien plus graves, allant jusqu’à l’annulation de la vente par le juge pour vice caché ou dol.
Et bien sachez qu’en matière de vente de terrain, c’est exactement la même chose.
Pour vous prémunir de tout risque d’action judiciaire, qu’elle vise une diminution du prix, le paiement de dommages et intérêts ou l’annulation de la vente, il est essentiel d’avoir une vision claire des contraintes et points faibles de votre terrain, et faire la part des choses entre contraintes et vices véritablement préjudiciables.
jaiunterrain.fr vous propose de passer en revue ces éléments et de voir lesquels faire figurer explicitement dans votre dossier de présentation.
Lister toutes les servitudes
Les servitudes valorisantes
Il faut comprendre par-là que certaines servitudes apportent un plus au terrain, soit parce qu’elles en accroissent le potentiel, soit parce qu’elles en augmentent la valeur notamment parce qu’elles influent sur son environnement.
Quelles peuvent être ces servitudes ?
Bien qu’il soit impossible de toutes les lister, attachons-nous aux plus parlantes et aux plus usuelles d’entre elles.
La servitude de passage
L’illustration la plus parlante du concept de servitude valorisante est celle de la servitude de passage au bénéfice du fond vendu, qui le désenclave et le rend en conséquence constructible.
Que l’emprise du droit de passage soit visible ou non, précisez-le impérativement : vous ne voudriez pas passer à côté d’une vente pour un non-dit, non ?
Les servitudes qui impactent la constructibilité des terrains voisins
Pensez aussi à faire mention de servitudes non altus tolendi lorsqu’elles grèvent le terrain voisin. En particulier si grâce à elle votre terrain bénéficie d’une vue exceptionnelle sur un élément du patrimoine naturel ou culturel remarquable. Les acquéreurs potentiels seront rassurés d’apprendre son existence si elle garantit que le terrain voisin ne pourra jamais recevoir de constructions susceptibles de boucher cette vue à couper le souffle.
Enfin, dans le même registre, s’il existe une servitude non aedificandi qui impacte le terrain voisin du vôtre, parce qu’il se trouve aux abords immédiats d’un monument classé, par exemple, faites le savoir dans votre dossier de présentation.
Même si elle ne vous concerne pas directement, par ricochet, elle assure une absence de constructions et donc de voisins pour le futur propriétaire de votre terrain qui envisagerait d’y construire sa maison.
Une véritable pépite pour les amateurs de calme et de vues dégagées qu’il serait dommage de ne pas leur révéler !
Vous l’aurez compris, ces servitudes qu’elles impactent directement votre bien ou par ricochet, doivent être mentionnées dans votre dossier de vente, car ce sont de véritables atouts qui peuvent vous permettre de faire la différence.
Les servitudes possiblement dévalorisantes
D’autres servitudes, qu’elles soient publiques ou privées, peuvent en revanche soit impacter la constructibilité d’un foncier, soit la contraindre, soit affecter la qualité du bien.
Certaines seront directement visibles, comme par exemple une servitude d’implantation de conducteurs aériens de distribution d’électricité quand une ligne électrique traverse le fond concerné ou les fonds voisins, et d’autres non, d’où la nécessité de révéler leur existence aux acquéreurs potentiels de votre foncier.
Rassurez-vous : si vous n’êtes pas parvenu à identifier toutes les servitudes que supporte votre bien au stade du dossier de vente, sachez que le notaire en charge de la vente aura l’obligation de les rechercher et de les faire figurer dans l’acte de vente. De plus, il est très vraisemblable, qu’à la demande de l’acquéreur, la promesse de vente que vous signerez avec lui comporte une condition suspensive d’absence de servitudes de nature à affecter la destination du bien.
Cependant, faute d’avoir informé suffisamment tôt l’acheteur de la présence de ces servitudes, vous courrez le risque qu’il se retire tardivement de la négociation, avec à la clé perte de chance, de temps et d’argent pour tous.
Quelles sont les servitudes dont vous devez impérativement informer les candidats à l’acquisition de votre bien que vous rencontrez ?
Les servitudes non altus tolendi et non aedificandi
Si elles sont une bonne nouvelle quand elles grèvent le fond du voisin, ces servitudes peuvent s’avérer être un vrai handicap quand votre foncier est le fond servant.
Dans ce cas de figure vous devez non seulement les mentionner dans votre dossier de vente mais surtout les matérialiser sur un plan si leur assiette ne concerne qu’une partie de votre terrain.
Si vous omettez de joindre un document graphique et que vous vous contentez de mentionner l’existence d’une servitude interdisant toute construction de plus de 1,3 mètre de hauteur sans préciser qu’elle ne concerne pas tout le terrain vendu, l’acquéreur intéressée par votre bien pourrait s’en détourner. Une situation qui pourrait se révéler particulièrement fâcheuse s’il s’avère que celui-ci aurait pu s’en accommoder.
Les servitudes de passage d’ouvrages
Le terrain que vous vendez supporte une servitude de passage de canalisations de distribution d’eau, d’évacuation des eaux usées ou de gaz ? Là encore, il est nécessaire d’en indiquer l’existence et de les matérialiser de sorte que l’acheteur potentiel puisse facilement se figurer leur emprise et la prendre en compte pour se projeter.
Si outre la présence de la servitude, vous disposez d’informations sur les contraintes qu’elle engendre, comme par exemple un recul ou une limitation des types de constructions admis dans la zone (exemple : interdiction des constructions à usage d’habitation mais garages et abris de jardins admis), il est important de le préciser.
Les servitudes de vue ou de cour commune
Si le terrain voisin de celui que vous vendez bénéficie d’une servitude de vue, vous devez l’indiquer dans votre dossier de présentation. Ce droit dont dispose le voisin de faire des ouvertures (fenêtres, balcons, terrasses) offrant une vue directe sur votre bien constitue une aggravation du vis-à-vis, qui peut s’avérer rédhibitoire pour certains acquéreurs potentiels.
Il en est de même pour la servitude de cour commune qui permet d’implanter des constructions sur les limites séparatives d’une parcelle à une distance inférieure à celle prescrite par le règlement d’urbanisme.
Les servitudes d’urbanisme
Votre terrain est frappé d’une servitude d’alignement qui impose la cession d’une frange de terrain issu de votre parcelle à la collectivité ? Il s’agit d’une contrainte à faire figurer impérativement dans votre dossier de présentation.
De même, si votre terrain supporte un emplacement réservé sur tout ou partie de sa superficie, il est essentiel de préciser :
- la nature de l’emplacement réservé,
- son emprise,
- la personne bénéficiaire de cette servitude (commune, département, etc.),
- ainsi que tout autre élément que vous aurez recueilli en mairie concernant le calendrier ou le mode opératoire envisagé par la commune pour la réalisation de son projet.
Remarque : Il en est de même si l’emplacement réservé a trait à la réalisation d’un pourcentage de logements sociaux.
Les autres servitudes d’utilité publique
Enfin, il ne faut pas négliger les servitudes de dégagement aéronautique si votre bien se situe aux abords d’un aéroport ou d’un aérodrome ou encore les servitudes relatives aux voies ferrées qui peuvent interdire les constructions ou un certain type de constructions dans un périmètre défini.
Certes, selon toute vraisemblance, votre candidat acquéreur relèvera de lui-même la présence d’un aéroport ou d’une voie ferrée à proximité du terrain. Dans ce cas, il ne manquera pas de vous interroger sur les nuisances sonores qui en découlent, mais n’aura pas nécessairement en tête le fait qu’au-delà du bruit, ce type d’infrastructure peut impacter la constructibilité d’un terrain.
Pour conclure
Encore une fois, la tentation peut être grande de passer sous silence ces éléments, dont vous jugez l’impact marginal de votre point de vue. Mais souvenez-vous que celui qui cherche à acheter un terrain, le fait au regard d’un projet qui lui est propre et qu’en conséquence, il ne va pas nécessairement partager votre appréciation.
Plus vous lui apportez d’informations et plus vite il sera en mesure de se positionner en tant qu’acheteur ou de se retirer de la négociation.
Quelle que soit l’issue, pour vous, vendeur, ce n’est que gain de temps et d’efficacité.
L‘environnement du terrain : ce qu’il convient de préciser
Mise en situation
Le terrain que vous vendez borde une route départementale très passante aux heures de pointe. Pour mettre toutes les chances de votre côté, vous avez pris la décision de le faire visiter un dimanche midi, en prétextant des impératifs professionnels en semaine. Soit ! On ne saurait se retourner contre vous pour cette raison.
Cependant, imaginons les scénarios possible des suites de cette visite.
Scénario n° 1
Après quelques jours de mûre réflexion, le couple auquel vous avez fait visiter votre terrain vous réclame une contre visite un jour de semaine, parce qu’ils sont absents le weekend suivant.
Il ne leur suffira que de quelques minutes pour mesurer le caractère passant de la voie. A partir de là, soit ils vous renouvelleront leur intérêt, soit ils vous remercieront et mettront poliment fin à la discussion, arguant d’avoir trouvé un terrain plus adapté et moins cher ailleurs.
Scénario n° 2
Ne voulant pas vous déranger puisque vous leur avez dit que vous n’étiez pas disponible en semaine, ils se rendront par eux même sur le site (en résistant à la tentation de pénétrer sur le terrain, s’il est non clos, espérons-le !), un soir en sortant du travail.
Interloqués par le flot de voitures, ils s’imagineront facilement qu’il en est ainsi à toute heure du jour ou de la nuit. Or, vous ne serez pas là pour leur préciser que certes, la départementale est passante mais qu’elle ne l’est que du lundi au vendredi de 7h30 à 9h et de 17h30 à 19h.
Faute d’avoir déminé la situation lors de la première visite, vous n’aurez probablement pas l’occasion de le faire à la suivante.
Scénario n° 3
Pas méfiant, le couple est totalement sous le charme de votre terrain sur lequel ils pourraient non seulement construire leur habitation principale mais aussi un local professionnel dans lequel Madame envisage d’ouvrir une micro-crèche.
Ils ne réclament pas de contre visite et ne prennent pas le temps de revenir sur les lieux à un autre moment de la semaine.
Le PLU autorise la réalisation de leur projet, d’après la synthèse des principales règles d’urbanisme que vous leur avez fournies dans le dossier de vente. Comme ils ont trop peur de voir le terrain leur passer sous le nez, il ne prennent pas le temps d’approfondir la faisabilité de leur projet et vous contactent pour signer une promesse de vente.
Dans cette attente, vous retirez vos annonces et congédiez les autres acquéreurs potentiels en leur indiquant que votre terrain n’est plus à vendre. Votre affaire est sur les bons rails… jusqu’à la veille de votre rendez-vous de signature de compromis chez le notaire.
En effet, le couple vous appelle pour vous dire qu’ils se retirent de la transaction car ont découvert que le nombre de véhicules empruntant la départementale par jour est trop important pour autoriser la présence d’un espace d’accueil d’enfants dans un périmètre de 1km à la ronde.
Conclusion
3 hypothèses tirées de faits réels et une seule conclusion : en voulant présenter votre bien sous son meilleur jour, vous avez minimisé les contraintes de son environnement, avez multiplié les visites et avez malheureusement perdu du temps, voire peut être même une chance de vendre.
Aussi, libre à vous, vendeur, de communiquer ou non dans votre dossier de présentation sur les éléments suivants :
- Le caractère passant de la voirie voisine,
- Le voisinage d’une casse automobile, en cours de cessation d’activité,
- La présence d’une école dont le dépose minute engorge la circulation dans tout le quartier aux heures d’entrée et de sortie des classes,
- Les effluves parfois portés par le vent venant de la fabrique industrielle de choucroute située à 800 m de votre terrain,
- Ou sur les horaires matinaux de livraison du supermarché voisin dont le quai de déchargement est en limite de votre parcelle.
Le dol ou la dissimulation volontaire d’éléments
En revanche, si vous dissimulez sciemment les défauts de votre bien à votre acquéreur pour le décider à conclure la vente, autrement dit que vous vous rendez coupable d’un dol, les conséquences de votre silence peuvent être toutes autres.
En effet, vous courrez le risque, en cas d’action judiciaire de sa part, de voir le juge annuler la vente et vous condamner au remboursement de l’intégralité du fruit de la vente, ou de vous condamner au remboursement d’une partie du prix sous forme de dommages et intérêts.
En admettant que, compte tenu de l’engorgement des tribunaux français et du délai de 5 ans dont dispose l’acquéreur pour engager une procédure, le jugement intervienne plusieurs années après la vente et que vous ayez déjà réinvesti tout l’argent dans l’acquisition d’un nouveau bien, vous pourriez, comme de nombreux propriétaires vendeurs, vous trouver dans une situation financière des plus délicates.
Et cela, personne ne le souhaite.
Exemples concrets de cas de dol
Il n’existe pas de liste exhaustive des cas de dol. C’est le juge, au travers de la jurisprudence, qui apprécie ce qui constitue un dol ou non.
En voici cependant quelques exemples :
- Cacher l’existence d’un projet immobilier d’envergure qui, une fois réalisé diminuera la valeur de la parcelle que vous vendez en la privant d’ensoleillement.
- Omettre sciemment d’informer sur la réalisation prochaine, à moins de 50 m de votre parcelle, d’une rocade automobile.
- Ne pas mentionner la présence d’un circuit automobile dans le quartier, qui ne respecterait pas la réglementation en matière de bruit.
- Oublier de parler de l’ouverture prochaine, à moins de 200 m du terrain, d’un élevage porcin contre lequel l’association de riverains est vent debout.
- Feindre d’ignorer que le voisin direct du terrain est à l’origine d’un trouble manifeste du voisinage, en se rendant coupable de tapage nocturne, de déversement d’ordures ménagères par-dessus la clôture, etc. au point qu’une association de riverains se soit constituée pour entamer une action à son encontre.
- Ne pas préciser que pendant des années, vous avez donné libre court sur le terrain à votre passion pour la mécanique auto au point d’avoir peut être causé une pollution du sol aux huiles de vidange.
Différence entre dol et vice caché
Comme vu ci-avant, le dol se définit par le fait de dissimuler volontairement un défaut majeur d’un bien en vue de pousser l’acquéreur à l’achat.
Le vice caché, lui, est un défaut dont l’acquéreur mais aussi le vendeur ignorent, en toute bonne foi, l’existence au moment de la vente.
Exemple concret
Vous vendez un terrain sur lequel vous n’avez jamais donné libre court à votre passion pour la mécanique. Vous affirmez donc qu’à votre connaissance, il n’existe pas de pollution des sols.
Imaginons que l’acquéreur de votre bien, en démarrant le terrassement de sa future maison, tombe sur de vieux bidons d’huile de moteur, dont le contenu s’est répandu sur une dizaine de mètres cubes de terre. En toute logique, il va se retourner contre vous, car la dépollution représente un coût important qu’il n’avait pas anticipé.
Il va donc demander une restitution d’une partie du prix de la vente (correspondant au coût de la dépollution, auquel vont s’ajouter des dommages et intérêts), voire pire, une annulation pure et simple de la transaction.
Dans ce cas de figure, certes, vous n’étiez pas au courant de la présence de ces bidons, donc vous n’avez pas pu cacher sciemment une chose dont vous n’aviez pas connaissance.
Il n’en demeure pas moins que vous en serez responsable, au titre de la garantie des vices cachés.
Comment se prémunir contre ce type de désagrément ?
Qu’auriez-vous pu faire pour vous épargner cette situation pénible ?
L’exonération de garantie des vices cachés
Sachez que vous avez la possibilité de demander que soit incluse dans l’acte de vente une clause d’exonération de la garantie des vices cachés.
ATTENTION : cette clause qui prévoit que l’acquéreur accepte le bien en l’état et renonce à toute action en justice sur le fondement du vice caché, n’est légale que si vous, vendeur, êtes un particulier.
De même, si le vendeur est une personne morale, de type SCI entre époux ou SCI familiale, qui a pour objet social la gestion d’un patrimoine immobilier et non la vente de terrains à bâtir, par exemple, la clause d’exonération de la garantie de vices cachés est légale.
Pensez « conditions suspensives »
A défaut d’avoir obtenu l’insertion d’une telle clause, si vous êtes désireux d’écarter tout risque relatif à la présence de pollution, l’autre solution consiste à inclure dans la promesse de vente une condition suspensive d’absence de pollution au bénéfice de l’acquéreur. A charge pour lui de commander et de financer, tout ou partie (à convenir avec le vendeur), d’une étude confirmant ou non l’absence de pollution.
Le même type de condition suspensive est envisageable pour écarter les risques liés aux vices cachés portant sur la nature ou la portance de sols.
Parce que le délai dont dispose l’acquéreur qui découvrirait un vice caché est de 2 ans à compter de la vente définitive, il est essentiel pour le propriétaire vendeur d’un terrain d’envisager toutes les hypothèses et de mobiliser toutes les ressources à sa disposition pour sécuriser sa vente.
Vous avez une question ? Un doute ?
Vous avez des difficultés à faire la part des choses entre dol, vice caché et vice apparent et vous ne voulez pas commettre d’impair dans votre dossier de vente ?